Accords de partenariat économique : le Nigeria toujours non partant

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Après la signature des APE par la Mauritanie, le Nigeria est actuellement le seul pays de la région ouest-africaine en reste. Image//Enda-CACID.

Ouestafnews – Après plusieurs années d’attente, la Mauritanie a paraphé, le 22 septembre 2018, les Accords de partenariat économique (APE). Une signature qui rapproche l’Afrique de l’Ouest de la ratification « finale » des accords.

Avec cette signature, le Nigeria est désormais le seul pays ouest-africain à n’avoir pas encore signé les APE. Une fois signé par Abuja, «l’accord sera soumis à ratification».

Cet accord a pour objectif «de promouvoir les échanges commerciaux entre l’UE (Union européenne) et les pays africains, de contribuer au développement durable, à l’augmentation des investissements, à la création d’emplois et à la réduction de la pauvreté», indique un communiqué de l’UE.

Les APE sont des accords commerciaux visant à développer le libre-échange entre l’UE et les pays dits ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique).

Signés en décembre 2014 par presque tous les Etats ouest-africains, les APE sont aujourd’hui adoptés par 15 Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Guinée, Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Niger, Sénégal, Sierra Leone, Togo et Mauritanie), à l’exception du Nigeria.

La Côte d’Ivoire et le Ghana sont actuellement liés au partenariat européen par «des accords d’étape». «Ces accords seront remplacés dans le futur par l’APE régional», souligne l’UE.

Accord régional  

En mai 2017, la Mauritanie a signé un accord pour la libre circulation des personnes et des biens et la  lutte contre le terrorisme avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).

La signature de cet accord «couvre quatre domaines : la liberté de circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux entre la Mauritanie et les 15 pays membres de la Cedeao», a indiqué le président de la Commission de la Cedeao, Marcel Alain de Souza, cité par l’Agence mauritanienne d’information (AMI).

Un communiqué conjoint de la conférence des chefs d’Etat de la Cedeao, du 31 juillet 2018, consulté par Ouestaf News, note que «la non signature de l’APE régional par tous les Etats membres et la mise en œuvre des APE intérimaires pose des défis importants au processus d’intégration régionale».

«Dans le souci de renforcer la coordination des politiques régionales et la coopération avec l’UE, le sommet lance un appel aux partenaires européens – à plus de flexibilité sur la question des APE – notamment sur le calendrier de la mise en œuvre », indique le document.

«Les accords de partenariat économique, les accords et les autres régimes commerciaux avec l’UE devraient être exploités dans toute la mesure du possible, pour former la base de la Zone de libre-échange continentale (ZLEC)», indique le communiqué de l’UE.

APE et ZLEC

Pour le directeur exécutif du Centre africain pour le commerce, l’intégration et le développement (Enda-Cacid), Dr. Cheikh Tidiane Dièye, les APE sont une contrainte à la ZLEC, c’est «la raison pour laquelle nous sommes opposés à leur signature».

Les APE sont une «approche extérieure qui avait tendance à reproduire le même système de domination et la mainmise économique d’une puissance étrangère sur le continent», a souligné Dr. Dièye dans un entretien avec Ouestaf News.

Il a expliqué que les APE « ne pouvaient pas être mis en œuvre parallèlement ou avant la ZLEC ». « Et c’est une raison suffisante pour nous de dire qu’il faut stopper les APE et de mettre en place la ZLEC », a indiqué Dr. Dieye.

Selon les estimations, la ZLEC couvre un marché de plus 1,2 milliard de consommateurs avec un Produit intérieur brut (PIB) combiné de 2.500 milliards de dollars.

En juillet 2018, 49 Etats ont signé le projet de ZLEC. Et six pays n’ont pas encore signé : Nigeria – pays le plus peuplé et première économie du continent – Bénin, Erythrée, Botswana, Guinée-Bissau et Zambie.

En mars 2018, lors du lancement de la ZLEC, le président nigérian Muhammadu Buhari avait renoncé à y participer. Cette réticence face à la ZLEC fait suite à la pression des opérateurs privés et des syndicats, notamment la Nigeria Labour Congress (NLC, quatre millions de membres).

«Il n’y a aucun doute que ce projet est nocif pour notre économie», avait déclaré le président du NLC, Ayubba Wabba, au quotidien privé nigérian, ThisDay.

«Le Nigeria poursuit les consultations au niveau international, discute avec le secteur privé nigérian et la société civile. Mais nous ne désespérons pas de le voir rejoindre le groupe», a souligné le Dr. Cheikh Tidiane Dièye.

La ZLEC a pour objectif «d’augmenter les échanges commerciaux à l’intérieur du continent et dynamiser le marché africain».

«Si nous enlevons les droits de douane, d’ici à 2020, le niveau de commerce intra-africain aura augmenté de 60%, ce qui est très, très significatif», a averti le commissaire de l’Union africaine, chargé du commerce et de l’industrie, Albert Muchanga, cité par l’AFP.

La Zone de libre-échange continental s’inscrit dans un processus devant mener, d’ici à 2028, à la création d’un marché commun et d’une union économique et monétaire en Afrique.

Selon le Dr. Cheikh Tidiane Dièye, les zones les plus prospères dans le monde, «ce sont les zones où le commerce interne est élevé».

«L’Union européenne commerce avec elle-même à hauteur de 70 %. L’Amérique du nord avec les Etats-Unis, le Canada et le Mexique commercent entre eux à hauteur de 60 %. En Afrique, ce système n’est qu’à 15 %», a précisé le directeur exécutif du Centre africain pour le commerce, l’intégration et le développement (ENDA-CACID).

ON/mn/ad

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